La chloroquine, un traitement antipaludique, est actuellement à l’étude dans le cadre d’essais cliniques pour lutter contre le coronavirus Covid-19. Les premiers résultats français seraient encourageants, selon le ministre de la Santé qui a autorisé d’autres essais plus vastes.
L’Institut hospitalo-universitaire (IHU) de Marseille, Méditerranée infection, teste depuis le 9 mars un traitement contre le coronavirus Covid-19 à base de chloroquine. Cet antipaludique commercialisé sous le nom de Nivaquine est essentiellement utilisé à titre préventif et curatif contre le paludisme.
Fin février, Didier Raoult, directeur de l’Institut Méditerranée infection, évoquait déjà l’efficacité de cette substance, au vu des résultats préliminaires obtenus en Chine lors d’essais cliniques menés sur une centaine de patients. À noter : ces résultats publiés le 19 février dans la revue BioScience Trends n’avaient pas été validés par un comité d’experts scientifiques.
Depuis, Didier Raoult déclare avoir testé la chloroquine en France sur 24 patients volontaires atteints du Covid-19. Dans une vidéo YouTube, le chercheur affirme qu’au bout de six jours de traitement par Plaquenil (nom commercial de la chloroquine), seuls 25% des patients seraient encore porteurs du virus. Tandis que 90% des patients non traités seraient toujours porteurs après la même durée.
Des résultats « intéressants » et « prometteurs », a déclaré Olivier Véran, ministre de la Santé lors d’une conférence de presse téléphonique mardi 17 mars.
Un traitement qui ne fait pas l’unanimité
En dépit de l’enthousiasme du Pr Raoult, la chloroquine divise les professionnels de santé. Les critiques portent notamment sur les effets secondaires de ce traitement en cas de surdosage : nausées, vomissements, affections du système immunitaire, affections gastro-intestinales, troubles hépatique voire hématologique… Certains médecins redoutent également des réactions très négatives en cas d’interactions avec d’autres médicaments, en particulier pour les patients placés en réanimation.
Le manque d’encadrement des premiers essais cliniques chinois et français est également décrié. Antoine Flahault, directeur de l’Institut of global health de Genève, s’est fendu d’un tweet pour faire part de son scepticisme. « Le développement du médicament est encadré pour la sécurité du patient et la santé publique. Le court-circuiter ainsi est un retour au Moyen-Age du médicament. C’est irresponsable et grave », a-t-il relevé mardi 17 mars.
Des essais cliniques à venir
Suite à cette découverte, le ministre de la Santé a annoncé le lancement d’un essai « plus vaste, initié dans les plus brefs délais sur un plus grand nombre de patients ». Il sera mené par des équipes indépendantes de l’Institut Méditerranéen afin de garantir la neutralité des essais. Essais qui auraient d’ailleurs déjà démarré à Lille.
Suite aux polémiques, Olivier Véran a par ailleurs rappelé l’importance des processus de validation scientifiques : « il est absolument fondamental d’asseoir toute décision de politique publique en santé sur des données scientifiques validées ». En effet, pour qu’un médicament/traitement soit autorisé, il faut que des essais cliniques aient prouvé son efficacité. Une étude en « double aveugle randomisée » est notamment indispensable pour assurer la neutralité du protocole. Concrètement, parmi les patients testés, une partie seulement doit recevoir le traitement, et ni les malades, ni les chercheurs ne doivent savoir qui l’a reçu (afin de contrôler l’effet placebo).
« Si les résultats sont favorables, nous aurons tous l’occasion de nous en réjouir », a conclu le ministre de la Santé.